La société DP Immobilier et vingt-trois autres personnes morales ou physiques de Baie Rouge et Baie aux Prunes (Plum Bay), dont l’ASL de Baie Rouge, ont présenté en décembre dernier au juge des référés une requête demandant l’annulation de l’arrêté de la Deal du 6 août 2019, soit la décision de la préfecture d’appliquer par anticipation la révision du plan de prévention des risques naturels (PPRN).
La demande a été examinée en audience publique le 23 janvier et la décision a été rendue le 6 février : la requête de la société DP Immobilier et des vingt-trois autres requérants a été rejetée.
Les arguments des riverains de Baie Rouge et Plum Bay
Ces derniers avaient développé qu’«aucun relevé du Cerema n’avait démontré que les propriétés situées à Baie Longue et Plum Bay avaient subi une submersion marine et qu’à Baie Rouge, seuls deux ou trois terrains avaient été affectés par la submersion mais non les maisons en raison de l’altimétrie de construction supérieure à la submersion».
Ils ont expliqué que l’arrêté leur interdisait de reconstruire leur habitation, or ils souhaitent pouvoir le faire en «prenant les mesures adéquates et en réduisant la vulnérabilité». «Cette reconstruction s’insère dan le cadre de l’intérêt public de l’île en ce qu’elle ferait disparaître des ruines défavorables au tourisme», ont tenté de faire admettre les requérants. Et d’ajouter de manière plus globale : «en interdisant les reconstructions en zone rouge foncée et en conditionnant celles-ci à l’existence d’un permis de construire initial, l’application du zonage maintient les populations dans une précarité morale, sociale et économique et surtout sécuritaire. (…) Cette suspension permettra l’autorisation des travaux de reconstruction et de réparation permettant de mettre en sécurité les personnes et les lieux pour parer sans délai au risque sismique avant la nouvelle saison pour le risque cyclonique».
Les requérants ont également fait valoir «l’intérêt public» de devoir suspendre l’application par anticipation du PPRN pour que «la paix sociale gravement troublée soit rétablie». «Le retour à une situation normale passe par la suspension de l’arrêté permettant la reprise de l’activité économique et touristique dans un contexte sécurisé», ont-ils argué en soulignant aussi que «le motif ayant conduit à son édiction n’existe plus du fait de la fin de la période cyclonique» et que «l’arrêté était entaché de détournement de pouvoir car le projet de révision ne vise nullement à prendre des mesures de protection pour sauver des vies humaines mais à répondre à une volonté politique émise par le chef de l’Etat».
• Les arguments de la Préfecture
Les services de l’Etat considèrent que les arguments des requérants (relevés du Cerema et saison cyclonique) «ne sont pas de nature à constituer une situation d’urgence au sens du code de justice administrative. Il en est de même de l’argumentation selon laquelle les bâtiments n’auraient pas été détruits par une submersion marine mais par la seule action des vents qui est inopérante ». «L’application par anticipation répond à des impératifs de sécurité publique visant d’une part à ne pas aggraver les risques existants, d’autre part à ne pas exposer plus de personnes aux risques dans l’attente de l’approbation finale », a-t-elle rappelé. Et de souligner : «si la saison cyclonique 2019 est effectivement terminée, il n’en est pas de même pour l’aléa cyclonique au titre de 2020, le risque dont il s’agit présente un caractère récurrent. »
• L’analyse du juge des référés
Ce dernier a rappelé tout d’abord qu’un acte administratif ne peut être suspendu uniquement s’il y a une condition d’urgence, c’est-à-dire lorsque l’acte «porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant». Or, dans le cas des riverains de Baie Rouge et Baie aux Prunes, le juge des référés a constaté que contrairement à ce qu’ils ont avancé, «il est loisible sous l’empire de la réglementation contestée d’entreprendre des travaux de mise en sécurité de leur habitation, de réparation sous réserve du dépôt d’une déclaration préalable ». Et de faire remarquer : «les requérants qui n’allèguent même pas avoir effectué une telle démarche et n’ont saisi le juge des référés que près de six mois après l’édiction de l’acte attaqué ne peuvent utilement soutenir qu’ils sont empêchés d’assurer la mise hors d’eau des bâtiments endommagés».
Le juge des référés partage également l’avis de la préfecture, selon lequel le risque cyclonique est récurrent, donc que l’application par anticipation des mesures révisées du PPRN est justifiée.
Enfin, concernant les troubles sociaux générés par la décision de la préfecture, le juge a observé que «la paie sociale était revenue».
C’est pourquoi la requête de DP Immobilier et des vingt-trois requérants a été rejetée (Soualigapost.com).
No comments