JUSTICE : Accident mortel de la Savane suite (2/3)

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• Les incohérences de l’enquête

«Bien que l’enquête soit clôturée, une gendarme prend attache avec le parquet le 5 juillet pour lui demander des investigations supplémentaires sur le scooter et lui précise qu’ils sont toujours en attente des résultats de toxicologie des deux jeunes décédés», indique maître Tillard. Les demandes sont refusées par le parquet.

L’avocat de la défense révèle également à l’audience que les gendarmes ont soulevé des «incohérences» dans les déclarations des prévenus. Et de brandir une feuille avec des notes manuscrites dont le titre écrit en haut est «incohérences». L’avocate lit un extrait du procès-verbal de l’audition de AB. Le gendarme lui demande comment en étant passager avant du pick-up il a pu voir la conductrice (assise à gauche) de la voiture de devant faire signe de la doubler.

Maître Tillard indique en outre qu’un gendarme avait suggéré de faire des investigations sur les sièges du pick-up. Les gendarmes voulaient ainsi vérifier la position des sièges : FR étant plus petit que AB, le siège du conducteur devait être davantage avancé que le siège du passager si les versions données par les deux protagonistes étaient vraies. Mais ces vérifications supplémentaires n’ont pas été réalisées. FR demeure le présumé responsable de l’accident mortel.

Selon l’avocate de la défense, si les gendarmes avaient poussé l’enquête et si les trois protagonistes avaient été interrogés le soir même, les débats qui ont suivi n’auraient pas eu lieu. «Mon client aurait craqué et aurait avoué qu’il était le conducteur», assure-t-elle en parlant de AB. Elle s’en dit d’autant plus convaincue que le soir même, AB l’a révélé à un témoin riverain : «la personne qui habite dans la maison se situant en face du lieu de l’accident est sorti immédiatement de chez elle, elle a parlé avec AB, lui a demandé qui conduisait à deux reprises, et AB a répondu que c’était lui. Mais cette personne n’a pas été interrogée ». Elle le sera plus tard.

Rebondissement dans l’affaire

«L’enquête a été bâclée», tel est aussi le ressenti des parties civiles. La vérité a pu être faite grâce «à l’acharnement des parents», souligne maître Delphine Tissot. «C’est moi qui ai recherché la vérité», affirme la mère d’un des deux jeunes à la barre du tribunal, qui a mené son enquête suite à la rumeur selon laquelle FR n’était pas le conducteur. C’est parce que les parties civiles (et la défense) ont demandé un supplément d’information à la première audience en octobre 2019, qu’un juge d’instruction a été nommé.

Et c’est durant cette seconde phase d’enquête que les protagonistes sont revenus sur leurs déclarations : AB reconnaît qu’il était le conducteur du pick-up, avoir demandé à FR de mentir pour lui. C’est aussi durant cette phase de nouvelles investigations, qu’une expertise du calculateur du pick-up a été effectuée et a révélé qu’il roulait à une vitesse de 64km/h au moment de l’impact (alors que la vitesse est limitée à 50km/h), qu’il était dans une phase d’accélération, qu’il n’a freiné que 15 secondes avant l’impact.

«Les parents se sont livrés à une bataille judiciaire car les auteurs des faits ont dissimulé la vérité, ont fait obstruction à l’enquête», poursuit maître Tissot. «Vous vous êtes illustré par le mensonge et la turpitude», lance maître Barreiro à AB.

AB est au cœur des débats. Les parties civiles lui reprochent d’avoir menti, de «ne pas avoir assumé ses responsabilités». Elles ne comprennent pas non plus comment il a pu demander à son ami de mentir et comment celui-ci a pu accepter de prendre toutes les responsabilités. «Ce qui cristallise leur douleur, est le fait que FR et AB donnent l’impression de ne pas assumer leurs responsabilités», insiste le parquet.

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